« La vie oscille, comme un pendule, de droite à gauche, de la souffrance à l’ennui ». -Arthur Schopenhauer
Nous souffrons d’un manque qui vient de notre désir d’obtenir quelque chose et nous tombons dans l’ennui lorsque nous obtenons la chose que nous désirions puisque nous ne la désirons maintenant plus. Ce constat est applicable à bien des égards. Exemple: Je veux un vélo, je suis triste de ne pas en avoir un. Puis, j’obtiens mon vélo, je ne le désire plus, cela m’ennuie. Mais aussi: J’ai faim, je n’ai pas encore à manger, je souffre. Puis, j’ai mangé, je n’ai plus faim, je me lasse. Et ainsi de suite.
Bien que cette vision de la vie que nous présente Schopenhauer se rapproche de se dont on fait l’expérience au quotidien, elle semble toutefois un peu fataliste et manque d’une nuance fondamentale à mon humble avis.
En effet, si ce pendule métaphorique va de gauche à droite et de droite à gauche. Il passe donc inévitablement par le milieu où il atteint un troisième point essentiel. Ce juste milieu est pour moi le bonheur: le moment où tu mange enfin quand tu as faim, le moment où tu bois enfin quand tu as soif, le moment où tu obtiens ce que tu désirais, ce qu’il te manquait, avant de t’en lasser. De ce point de vue là la souffrance et l’ennui n’empêchent pas le bonheur. Au contraire, ils le créent.
Le réel piège selon moi c’est de ne plus ressentir ni la souffrance liée au fait de désirer quelque chose, ni l’ennui lié à l’obtention de cette chose. Le véritable piège c’est celui que cette société tente de nous imposer, celui qui nous enlève le temps de ressentir ces choses. On tombe dans des routines fades dans lesquelles on préfère faire taire nos émotions pour être capables de supporter notre quotidien sans tomber en dépression. Le piège c’est de finir par choisir de ne rien ressentir de profond pour ne plus être blessé.
Je crois fermement qu’il ne peut pas y avoir de hauts sans bas. Si on ne se laisse jamais être triste on ne peut jamais réellement être heureux. Si on ne se laisse jamais être en colère face à certaines absurdités de la vie, on ne peut jamais réellement être en paix. Cependant, il faut naviguer ses propres émotions à la recherche d’un équilibre sain. Et non pas se laisser dominer sans aucune forme de contrôle sur ce que l’on ressent.
Du moins, cette vision de la vie me conforte dans l’idée de ne pas toujours me sentir bien. J’accepte avec plus de facilité les moment dans lesquels je souffre énormément car j’ai la foi de m’en souvenir lorsque je serais bénie d’un événement qui me rend heureuse et, ainsi, de l’apprécier encore plus.
Bien évidemment, je ne sous-entend pas qu’il faut être misérable pour ensuite pouvoir être heureux. Je ne suis pas sadique. Cependant, comme pour tout dans la vie, j’estime que c’est une question d’équilibre. Si nous refoulons nos émotions et refusons de ressentir ce qui nous traverse naturellement lors d’événements tragiques ou simplement malheureux, nous nous enfermons dans une sorte de bulle de superficialité qui ne nous laisse pas non plus accéder à des sensations positives naturellement fortes. Pour y accéder, on se tourne donc vers des exhausteurs tels que l’alcool, les drogues, la fête en excès… etc. On se rend d’abord passif et apathique face à des situations déplaisantes et on recherche ensuite désespérément un moyen malsain de ressentir quelque chose. Alors, laissons le pendule faire son trajet. Laissons-nous aller de la souffrance (du désir ) à l’ennui (le manque) pour pouvoir ressentir tout ce qui se trouve entre les deux. Acceptons de naviguer toutes nos émotions, en les laissant être, au lieu de les fuir.
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